Maurice CORDIER 1886 - 1967
Notre Grand-oncle du Boulevard Jean-Jaurés
NANCY
(blessé et fait prisonnier à la bataille de Morhange)
Maurice dit "Oncle Maurice" voit le jour à Essey et Maizerais le 27 juillet 1886, son frére Gabriel, notre grand pére est alors agé de six ans. Emile son pére est épicier.
Il épouse Alice MACRE en 1913 à Blénod les Toul (54), il aura un enfant Pierre né le 17 mars 1914 à Essey, qui décédera à Essey le 7 octobre 1914, aprés le départ de son pére pour la grande guerre.
Le 1er Août 1914 à 15h55, l'ordre de mobilisation générale parvient à Nancy, les affiches sont partout dans nos campagnes.
Maurice CORDIER comme tous les hommes nés entre 1881 et 1890, fait partie de la Réserve de l'Armée active. Il a reçu l'ordre de mobilisation, transmis par le Maire.
Par la tacot de Thiaucourt avec sa halte à Essey, il était facile de rejoindre rapidement Toul. Le 160éme Régiment d'infanterie a déjà quitté ses baraquements d'Ecrouves, pour assurer la sécurité de la frontiére.
Le 160éme R.I. avec le 156éme R.I. forment la 78éme brigade d'Infanterie, rattachée à la 39éme division d'infanterie qui est rattachée au XXéme corps d'armée commandée par le Général Foch.
L'équipement du fantassin consiste en une grosse capote en pleine canicule du mois d'Août 1914 et du pantalon rouge garance qui fit de nos soldats des cibles idéales pour les mitrailleuses allemandes!
Le 19 août 1914, à 7 heures du matin, le régiment qui a stationné quelques jours à Vic, se met en route vers Morhange et le signal de Marthil. La journée de marche est rendue fatiguante par la longueur de l'étape et la chaleur étouffante. Les sacs commencent à peser lourd sur le dos des fantassins, engoncés dans leurs chemises de flanelle.
A l'approche de Marthil,le régiment essuie des coups de feu et l'un tue le Capitaine BREYNAT, première victime du 160éme RI. Les coups de feu sont bientôt suivis de tirs d'obus allemands, mais le régiment réussi cependant à occuper la position de Marthil sans difficultés majeures.
Mais au matin du 20 août,l'ennemi qui avait fini par attirer les troupes françaises là où il voulait les anéantir, contre-attaque avec énergie. Dés le matin les canons et obusiers allemands yonnent et font des ravages parmis les rangs. Lorsqu'ils finissent par se taire, c'est au tour de l'infanterie allemande d'entrer en action et de refouler le 160éme dont la progression est irrémédiablement stoppée.
Le régiment subit au cours de cette journée de lourdes pertes, prés de 33 officiers et 1800 hommes sont mis hors de combat, dont le caporal Maurice CORDIER, blessé et fait prisonnier, pour qui la grande guerre n'aura duré que moins d'un mois, mais qui sera suivie de plus de quatre année de détention en Allemagne.
C'est dans la cour de la caserne de Morhange, que les allemands regroupent les blessés français.
Dans ce petit bourg de Morhange, Maurice CORDIER, n'imagine pas qu'au milieu du 18éme siécle, un de ses ancêtres CORDIER, est venu prendre épouse à Morhange où il aura plus de cinq cents descendants qui sont presque tous restés sur place àprés le conflit de 1870. Certains de ces fils portent l'uniforme prussien!
Dans cette caserne de Morhange,les morts cotoient les blessés.
Maurice ne sait pas non plus qu'un de ses cousins éloignés: le Capitaine Jean KAUFMANT du 79éme RI (fils du Général Joseph Kaufmant, notre cousin par alliance.)blessé à la tête agonise dans les bras de son frére Pierre son cadet d'un an, lui aussi Saint-Cyrien, chef de section au 69éme RI. La bataille de Morhange aura été terrible.
Maurice nous dira toujours qu'il a été bien soigné et bien traité par les allemands, celà n'a pas toujours été le cas et il y a eu de nombreuses exécutions sommaires de blessés et de prisonniers.
Maurice dont le papa était né à Boulay avant la guerre de 1870, connaissait-il quelques bases d'allemand, celà est possible.
Prisonnier quelque part en allemagne
En mai et juin 1915, on retrouve sa trace dans un camp de prisonniers à Stuttgart
Pendant ce temps là, en janvier 1915, son épouse Alice MACRE, qui a perdu son fils de quelques mois,rejoint Nancy depuis Essey et Maizerais en compagnie de ses beaux-parents Emile CORDIER et Eugénie DIDIER en transitant par la Suisse comme tous les évacués des zones occupées proche des combats.
Le passage par la Suisse s'effectue sans encombre et l'accueil de la Croix Rouge est chaleureux. En cette même année notre grand Mére Alice MOREL-CORDIER et son fils Jean, notre papa, transiteront aussi par la Suisse pour rejoindre Limoux.
Libéré à la fin de la guerre, Maurice restera dans la branche de l'épicerie, il sera représentant à Nancy chez Louis Dix-Neuf de Félix Potin. A cette époque, il a déjà une voiture, ce qui est exceptionnel pour cette période. Il voyagera beaucoup.
Nancy : 4 Bld Jean-Jaurés
Logement au 2éme étage
Dans les années cinquantes, nous allions trés souvent chez cet arriére-grand oncle qui habitait au 4 du boulevard jean Jaurés tout prés de nous qui étions rue Villebois Mareuil.
Nous avons de trés nombreux souvenirs sur cette époque,où le rituel de l'absinthe avec l'eau versée sur le sucre m'impressionnait toujours, ainsi que le petit poêle à bois en faïence verte que Maurice chargeait avec du bois qu'il entreposait au grenier, aprés l'avoir monté à la corde par la cage d'escalier. Que de peurs dans cet escalier qui n'avait pas de fenêtre et donc toujours dans le noir!
Arrivés dans le petit appartement de deux piéces, souvent la table était recouverte de pâtes fraîches en train de sécher (une spécialité de Maurice!) Alice les poussait délicatement pour me laisser un petit emplacement , sur les genoux de maman, j'avais alors le droit de jouer avec deux horribles statuettes en bois qui représentaient,je crois des chouettes!
Si la table était libre, Maurice sortait "ses" cartes Michelin d'avant guerre qu'il conservait précieusement et voilà comment nous voyagions! Avant de repartir il ouvrait grand ses placards aux lourdes portes en bois pour nous montrer son stock d'épicerie la fin de la guerre, ses privations et le rationnement n'étaient pas encore loin.
Je n'ai pas en mémoire avoir été dans la chambre, qui me tentait pour voir le balcon!
Nancy 1949: Jean, Maurice et Gabriel Cordier à la communion
Alors qu'il avait largement passé l'âge de la retraite, Maurice CORDIER effectuait de petits travaux de bureau pour le compte du service des impôts, sa belle écriture l'avait fait embaucher pour rédiger à la plume les feuilles jaunes (à l'époque), de notification des impôts locaux. Il connaissait ainsi tout sur les impôts des habitants du quartier....
Il décéde un peu avant ses quatre vingt un ans, à Nancy, aprés la cérémonie à L"église Saint Joseph, il repose maintenant au cimetiére du Sud à proximité de notre tombe familiale.
Nous garderons toujours le souvenir de cet homme toujours accueillant, souriant et plein de vie.
Bibliographie:
Histoire du 160éme Régiment d'infanterie.
http://www.160eri.webuda.com
La bataille de Morhange de André BELLARD.
La Gazette des Ardennes.